Chers parents,
Dans notre société moderne, le concept du “projet Mbappé” est devenu une triste réalité pour de jeunes sportifs, parfois âgés de seulement 8 ou 9 ans. A travers cette lettre ouverte, mon but est de dresser un constat tout en partageant ma perspective, basée sur une vision ajustable et critique de la situation actuelle. Par ailleurs, tout en reconnaissant l’intérêt du débat, je souhaite également vous offrir quelques outils constructifs. Étant donné l’ampleur du sujet, j’ai choisi de structurer mon argumentation en plusieurs points.
1. Les Comparaisons
Nombreux sont ceux qui recourent à la comparaison pour évaluer de jeunes sportifs. Cependant, il existe de nombreux biais dans ces comparaisons. Des éléments tels que le poids, la taille, la courbe de croissance, la préférence pour un pied ou une main, ainsi que le développement psychologique de l’enfant, faussent souvent ces comparaisons. Est-il vraiment judicieux de comparer un enfant jouant dans l’équipe “B” avec des enfants de l’équipe “A” ? Est-ce pertinent de se mesurer aux autres joueurs de sa catégorie pour progresser ? Ces questions méritent d’être abordées et je vous encourage à partager vos avis dans les commentaires.
Ce qui m’ennuie particulièrement dans le “projet Mbappé”, c’est que ce joueur exceptionnel n’a pas été volontairement choisi pour être un exemple de cette manière. Saviez-vous que ses premières années à Monaco ont été difficiles ? Qu’il a dû faire face à des périodes de peu de temps de jeu et à des moments plus compliqués ? Cela n’entre pas dans le récit de rêve ou de vente, mais c’est la réalité. Pour comparer à Mbappé, l’un des meilleurs joueurs mondiaux, regardez des matchs datant de 5 ans auparavant et comparez-les avec les matches actuels pour voir sa progression. Utilisez la même approche avec vos enfants sportifs.
2. Statistiques concernant les jeunes qui deviennent professionnels
Pour étayer mon propos, prenons quelques statistiques et examinons l’exemple du sport avec le plus grand nombre de licenciés en France, le football.
- 2,18 millions de licenciés, dont 220 352 féminines.
- Sur 700 joueurs formés par génération, seuls 130 signent un premier contrat professionnel.
- Chaque année, entre 600 et 620 joueurs quittent le club où ils ont été formés sans contrat professionnel.
- Quelles sont les chances de devenir joueur de football professionnel ? Moins de 1 % des enfants qui intègrent une école de football européenne à l’âge de 9 ans réalisent leur rêve de devenir joueur professionnel (selon le Business Insider UK).
Je ne cherche pas à décourager, mais plutôt à sensibiliser sur l’importance pour un enfant de pratiquer un sport par plaisir. L’entraînement devrait viser à développer ses qualités physiques, techniques, tactiques, mentales et humaines. Le sport est aussi une école de vie. En observant votre enfant dans son sport, concentrez-vous sur la joie qu’il éprouve lorsqu’il réussit, et guidez-le vers ce bonheur.
3. Le poids des mots
Toujours dans l’op/que de vous proposer des éclairages et des outils pour participer à un accompagnement de l’enfant plus qualitatif, saviez-vous que les mots que vous choisissez ont un fort impact sur les pensées, la concentration… de vos enfants ?
« Attention à lui, il est plus rapide que toi » : Peut-être que c’est une réalité, mais vous confrontez l’enfant à un problème, pas à la solution. Or, c’est la solution dont il a besoin.
« Aujourd’hui tu dois être bon » : Le verbe devoir est une obligation. La première manifestation physique du stress va notamment être l’augmentation de la fréquence cardiaque, qui va impacter également la concentra/on et enfin les qualités globales. À partir d’aujourd’hui, votre enfant ne doit pas être bon, il est capable d’être bon.
« Si tu mets 3 buts, ce soir c’est fast food » : C’est une technique qui fonctionne régulièrement, elle a pu fonctionner sur moi également je l’admets. J’ajoute celle-ci pour vous sensibiliser sur la fréquence à laquelle vous utilisez cette phrase. Si vous l’utilisez à chaque fois, votre enfant sera toujours sur une motivation extrinsèque (la récompense) et non intrinsèque (fier de lui-même). En revanche, si vous insistez sur la récompense personnelle, la fierté de faire des efforts, de prendre du plaisir, progresser, vous développez sa motivation intrinsèque. Par exemple « Sois attentif sur le discours de ton entraîneur avant le match et fais ce que tu sais faire et à la fin du match, tu pourras être fier de toi ».
Si votre enfant met 3 buts, il peut également être fier de lui, sans pour autant remplir son ventre, cela renforcera sa confiance.
4. Le focus sur le résultat uniquement
Et si on accordait chez les jeunes des points/buts supplémentaires sur les équipes qui jouent le mieux ? Idée assez farfelue en effet, mais celle-ci découle du fait que nous accordons bien trop d’importance à la finalité et non au chemin qui nous y amène (Très philosophique me direz-vous)
Alors expliquons nous : Beaucoup de coachs/éducateurs reçoivent des messages de parents, qui, la veille du match, demandent de justifier le fait que l’enfant joue en « B » et pas en « A ». Le problème vient sûrement du fait qu’il existe ce type de lettres pour définir les équipes mais il semble tout de même u/le de faire jouer les enfants selon le niveau qu’ils ont ACTUELLEMENT.
La réalité est que, en tant que parents, vous ne devez pas vous soucier de l’équipe dans laquelle joue votre enfant. Par exemple, au football, pensez-vous que votre enfant sera plus satisfait de jouer 20 minutes et de n’avoir que très peu d’impact dans son équipe ou bien jouer 40 minutes et avoir un rôle à jouer sur le score final ainsi que la prestation collective ? La réponse est toute trouvée et c’est à vous en tant que parents de l’accepter, d’accepter les choix d’un entraîneur, et de préférer échanger avec l’entraîneur sur les axes de progression de votre enfant plutôt que l’équipe dans laquelle il évolue.
5. Le rôle des parents
Les objectifs de cette lettre ouverte sont multiples. Parmi eux, vous donner l’opportunité d’avoir des idées sur ce qu’est l’accompagnement de l’enfant sportif vers son bien-être sans critiquer votre manière actuelle de faire les choses. De plus en plus, les parents cherchent à ce que les enfants s’entraînent encore plus. Sachez une chose, le PLUS est l’ennemi du MIEUX. Votre enfant n’a peut-être pas besoin de 3 séances supplémentaires chaque semaine, de votre analyse à chacun de ses matchs, de la pression qu’il a lorsque les parents sont présents autour du terrain. Votre enfant a besoin :
⁃ D’une alimentation saine. Lorsqu’un enfant pratique un sport, les outils de travail sont le corps et le cerveau. Apporter une alimentation saine permet de mettre de l’essence dans le moteur, d’avoir l’énergie et la concentration nécessaire pour les efforts qu’il ou elle devra faire. Si vous pensez ne pas avoir les outils nécessaires pour l’alimentation de vos enfants, n’hésitez pas à vous renseigner dans un premier temps auprès des éducateurs et référents des clubs qui peuvent avoir des informations ou fiches à transmettre. Si vous ne le souhaitez pas, vous pouvez également consulter un/une nutritionniste, professionnel qualifié qui saura vous aiguiller
⁃ D’un bien-être : Pierre ou Sarah n’a peut-être pas besoin qu’on lui dise qu’elle « doit » gagner sa compétition mais plutôt que vous croyez en elle, en ses capacités et qu’il doit prendre du plaisir pendant la compétition avec de l’envie, l’envie de bien faire les choses. Et enfin, faites-lui comprendre que ce n’est que de l’appren/ssage, que l’erreur existe et que l’entraînement servira justement à gommer ces erreurs.
⁃ D’apporter de l’autonomie et une autocritique : Rien ne vous empêche de faire un bilan de la compétition avant votre enfant mais qui débute en général ce bilan ? C’est vous, avec ce que vous pensez de la prestation. Demandez d’abord à l’enfant ce qu’il a pensé de celle-ci et en fonction de ses retours, demandez-lui comment aurait-il pu mieux faire ? S’il n’a pas toutes les réponses, vous avez bien entendu le droit de lui apporter quelques réponses que vous estimez pertinentes mais sur l’aspect technique, la solution sera sûrement de l’amener à demander à son éducateur au prochain entraînement, c’est par ce chemin que passe l’autonomie mais également la justesse dans les feedbacks. Votre enfant ne détient sûrement pas la vérité, vous non plus, l’éducateur non plus sur certaines situations, mais les différents retours feront la richesse de l’apprentissage.
⁃ Transmettre la culture du mieux : Comme j’ai pu l’évoquer, le plus est l’ennemi du mieux. Moi-même préparateur mental, je propose des suivis à des jeunes sportifs sur le plan mental, je propose à des enfants des solutions pour progresser sur le plan cognitif comme le logiciel Cranione, mais l’objectif est toujours de vouloir travailler mieux, pas de travailler plus. La quantité de travail ne fait pas la qualité. Si vous aviez le choix entre gagner 100 euros tout de suite ou bien dix euros par mois pendant deux ans, que feriez- vous après réflexion ?
J’espère que cette lettre ouverte vous apportera réflexions, critiques, apprentissages car le sujet des parents dans le sport revient régulièrement dans les débats. Si vous avez apprécié et que vous souhaitez avoir plus de choses à ce sujet ou avez des idées sur des sujets d’articles, n’hésitez pas à nous écrire un commentaire ou à nous contacter.